La langue française, avec ses nombreuses règles et exceptions, peut parfois nous confronter à des dilemmes orthographiques intéressants. L'un de ces cas particuliers concerne le pluriel de l'adjectif « banal ». Faut-il écrire « banals » ou « banaux » ? Cette question, qui peut sembler anodine, révèle en réalité une subtilité linguistique fascinante qui mérite notre attention.
La règle générale : « banals »
Dans l'usage courant et moderne du français, la forme plurielle recommandée pour l'adjectif « banal » est « banals ». Cette règle s'inscrit dans la tendance générale des adjectifs se terminant en « -al » au singulier, qui forment leur pluriel en ajoutant simplement un « s ».
Cette forme est largement acceptée et utilisée dans la littérature contemporaine, les médias et la communication quotidienne. Elle reflète l'évolution naturelle de la langue française vers une simplification des règles grammaticales.
L'exception historique : « banaux »
Cependant, la langue française ne serait pas ce qu'elle est sans ses exceptions. La forme « banaux » existe bel et bien, mais son usage est beaucoup plus restreint et spécifique. Cette forme trouve son origine dans le contexte historique de la féodalité.
« Banaux » était utilisé pour désigner les biens appartenant au seigneur féodal, soumis à une redevance. Ces biens étaient dits « banaux » car ils étaient liés au « ban », c'est-à-dire à l'autorité seigneuriale.
Pourquoi cette distinction ?
La coexistence de ces deux formes s'explique par l'évolution de la langue française et la spécialisation des termes. Alors que « banals » s'est imposé dans l'usage courant pour décrire ce qui est ordinaire ou sans originalité, « banaux » a conservé son sens spécifique lié au contexte féodal.
Cette distinction permet une nuance sémantique intéressante :
- « Banals » se réfère à ce qui est commun, ordinaire, sans intérêt particulier.
- « Banaux » garde une connotation historique et juridique, liée aux droits seigneuriaux.
L'évolution de l'usage
Il est intéressant de noter que la langue française tend à simplifier ses règles au fil du temps. Comme le soulignent plusieurs linguistes, dont Henri Frei et Charles Bally, le français devient de plus en plus réfractaire aux pluriels en « -aux » pour les adjectifs en « -al ».
Cette tendance à la simplification explique pourquoi « banals » est aujourd'hui la forme privilégiée dans la majorité des contextes, y compris dans la littérature et les médias.
Comment s'en souvenir ?
Pour éviter toute confusion, voici quelques astuces pour vous rappeler quelle forme utiliser :
- Pensez à l'usage courant : dans la vie de tous les jours, optez pour « banals ».
- Si vous parlez d'histoire ou de droit féodal, « banaux » pourrait être approprié.
- Associez « banals » à d'autres adjectifs courants qui suivent la même règle : fatals, natals, glacials.
En conclusion
La question « banals ou banaux ? » illustre parfaitement la richesse et la complexité de la langue française. Bien que « banals » soit la forme recommandée dans la majorité des cas, la persistance de « banaux » dans certains contextes spécifiques témoigne de l'histoire et de l'évolution de notre langue.
En tant que locuteurs ou rédacteurs, il est important de comprendre ces nuances pour choisir la forme la plus appropriée selon le contexte. Cette connaissance nous permet non seulement d'écrire correctement, mais aussi d'apprécier les subtilités de la langue française.